Nombre de pages : 432 pages
Date de sortie : 7 mars 2019
Prix : 22 euros
Résumé :
"Jean McClellan est docteure en neurosciences. Elle a passé sa vie dans un laboratoire de recherches, loin des mouvements protestataires qui ont enflammé son pays. Mais, désormais, même si elle le voulait, impossible de s’exprimer : comme toutes les femmes, elle est condamnée à un silence forcé, limitée à un quota de 100 mots par jour. En effet, le nouveau gouvernement en place, constitué d’un groupe fondamentaliste, a décidé d’abattre la figure de la femme moderne. Pourtant, quand le frère du Président fait une attaque, Jean est appelée à la rescousse. La récompense ? La possibilité de s’affranchir – et sa fille avec elle – de son quota de mots. Mais ce qu’elle va découvrir alors qu’elle recouvre la parole pourrait bien la laisser définitivement sans voix…
Christina Dalcher nous offre avec Vox un roman dystopique glaçant qui rend hommage au pouvoir des mots et du langage."
Mon avis :
Quand j'ai lu le résumé, frisson, horreur et curiosité m'ont piquée telle une abeille laissant son dard et sa frayeur dans la peau après s'être envolée (ou avoir été écrasée... Pas cool, la pauvre, si tu veux du miel, ne tue pas les abeilles, voyons !). Il ne m'en fallait guère plus pour tenter ma chance pour le recevoir, si ce n'est de qualifier l'histoire de "dystopie", un genre que je kiffe beaucoup trop !!!
Posons ce cadre de rêve procurant joie, bonheur et apaisement, surtout pour les femmes qui ont été réduites au rôle de marionnettes dont les fils sont désormais tirés par les hommes : vous hésitez pour votre futur ? Venez vivre dans cette fabuleuse Amérique où les femmes n'ont plus qu'un rôle à jouer, celui de l'épouse docile dont la bouche est pratiquement cousue par un compte-mots (et non un bracelet !) qui leur permet d’exprimer 100 mots à voix haute par jour. Après, ça fait mal…
Vous vous demandez sûrement comment la femme a pu être privée de son libre arbitre ainsi ? Crescendo, les idées d’un petit groupe de religieux extrémistes se sont répandus comme des champignons toxiques à travers le pays, et une fois les hommes promulguant ce genre de pensées (aussi avancées, ne datant pas du tout de l’âge de pierre (quoique même à cette époque, les femmes devaient être mieux considérées)) sont arrivés au pouvoir, ont investi le gouvernement, il était trop tard. Manifestations, révoltes, rassemblements et autres mouvements de contestations n’ont pu stopper l’implantation, l’envahissement de ces idées toxiques emprisonnant les femmes dans une vie sans couleurs.
Maintenant, l’héroïne Jean doit vivre avec des regrets et de (trop beaux) souvenirs qui n’ont point été imaginés. Elle subit en silence la colère et la frustration d’avoir acquis une position aussi importante que celle d’une poupée chez les adultes (car les enfants ont plutôt tendance à vénérer leur doudou qu’à le mépriser), jusqu’à ce qu’une occasion se présente à elle : le frère du Président-Dictateur a eu un accident touchant une zone du cerveau que Jean a étudié en long, en large et en travers ! Ses services sont demandés, et à partir de là, Jean va se bouger et réfléchir à la façon dont ses actes pourraient ébranler le gouvernement.
Une lecture très intéressante, qui pousse à la réflexion ! C’est atroce d’apercevoir comment une société peut basculer dans l’extrême, comment des idées allant à l’encontre des droits fondamentaux de TOUS les Hommes sont propagées et enflamment la majorité de la population. C’était déchirant de voir les femmes évincées de toutes les scènes de la vie sociétale, mis à part celle de la sphère familiale où son rôle est de s’occuper de la maison, des enfants et de son mari. Plus aucune liberté, plus aucune aspiration d’octroyer si ce n’est de devenir une épouse dévouée à sa famille (trop de choix, on adore).
A travers le personnage de Jean, ses souvenirs nous permettent de comprendre le basculement vers une société 500 % patriarcale. Le mélange entre passé et présent est bien dosé, j’avais un peu de mal au début, mais ensuite, je m’y suis habituée : le tout se marine bien, surtout avec l’effroyable futur que dessine la jeune femme si le gouvernement reste comme tel ! Elle pense (surtout !) à sa petite fille de six ans, puis à ses garçons, à leur avenir dans un tel monde… Interdiction aux livres (mis à part la Bible qui prêche la parole et les idées du Président-Dictateur (propagande bonjour)) et ne plus apprendre à lire aux filles, quelle vie ! Je signe où ?!? (ironie)
Jean se remémore à plusieurs reprises sa jeunesse, ses idées et le contraste entre sa non-réaction et l’engagement obstiné de son amie Jackie face au mouvement extrême qui s’imposait dans son pays. Elle ne pouvait admettre, véritablement voir à quel point la situation devenait et allait devenir critique ! C’était tout simplement inconcevable (spoiler alerte : et ben non. Tout peut arriver, comme quoi.). L’horreur n’arrive pas qu’aux autres : les combats et les luttes ne se terminent jamais. L’acquis peut vite être remis en question…
Une histoire captivante, qui se lit sans problème même avec le côté scientifique entremêlé à l’intrigue ! Je ne suis pas une grande fan des sciences, mais ici, l’autrice évoque un sujet passionnant et pas de manière trop compliquée : c’était compréhensible et intéressant !
"On ne naît monstre. On le devient, morceau par morceau, membre par membre, création artificielle d’hommes fous qui, à l’image du malavisé Frankenstein, pensent toujours tout savoir mieux que les autres."
Sinon, Jean se révèle d’autant plus attachante par ses qualités et ses défauts (elle est loin d’être parfaite et courageuse h24, elle pense à elle également), puis ses émotions sont bien transmises ! Même si l’histoire est très centrée sur son personnage (ce qui donne parfois une dimension restreinte), j’ai bien aimé découvrir son évolution ! Elle entre tout de même en interactions avec d’autres personnages bien traités, comportant des caractéristiques particulières, alors c’était chouette.
Concernant la fin, je reproche sa rapidité même avec la surprise qu’est le changement de bord d’un des personnages ! J’étais vraiment étonnée ! Mais les évènements s’enchainent vite et même si tout n’est point rose, j’aurais aimé qu’il y ait plus de noirceurs… (Autrement, j’suis sympa hein !) Avec une ambiance aussi pesante et étouffante d’installer (des caméras étaient même installées chez les gens afin de les surveiller… Non, non, ce n’était pas une téléréalité.), je m’attendais donc à une fin moins « facile » !
Pour conclure, je recommande vivement cette dystopie offrant frissons (et pas de douceur, mais plutôt du genre glacé (parfait en cette canicule alors !)) ainsi que du sport à nos neurones ! Une histoire bien écrite et importante.